Nouveau denier de la gens Porcia

Nouveau denier de la gens Porcia à venir qui est l'occasion de publier un post pour cette Gens.

En attendant la nouvelle entrée je vais réparer deux gros oublis en vous présentant deux monnaies qui furent frappés  en pleine guerre Sociale en 89 avant J.C. par Marcus Porcius Cato (un descendant de Caton l'ancien qui vécut entre 234 et 149 avant J.-C.)


(116 coins de droit & 129 coins de revers selon les estimations de Crawford)
Denier figurant au droit un buste féminin drapé à droite avec la titulaire M. C(AT)O en monogramme et ROMA derrière la tête. Le revers représentant la Victoire assise à droite avec les ailes déployées, tenant une patère de la main droite et une palme de la main gauche (VIC(TR)IX en monogramme à l'exergue).


(400 coins de droit & 444 coins de revers selon les estimations de Crawford)
Quinaire figurant au droit la tête imberbe de Bacchus (ou Liber) tournée à droite et coiffée d’une couronne de vigne avec la titulaire M. C(AT)O en monogramme. Le revers représentant la Victoire assise à droite avec les ailes déployées, tenant une patère de la main droite et une palme de la main gauche (VIC(TR)IX en monogramme à l'exergue).

A noter que ce monnayage sera repris par son fils Caton d’Utique (95-46 avant J.-C.).

Magnifiques, et merci pour les descriptions toujours complètes et instructives de tes monnaies

Très belles monnaies, et le quinaire est remarquablement peu usé...!!

Joli quinaire en effet, et le denier est magnifique.

Joli duo ! Très jolies monnaies.

Merci à tous. Voivi enfin le denier qui est à l'origine de ce post tardif.

Il s'agit d'un denier émis par Publius Porcius Læca vers 110 – 109 avant J.-C.


Diamètre : 20 mm, Poids : 3,95 g, Axe : 2 h

L'avers représente la tête casquée de Rome à droite avec sous le menton la marque de valeur X (10 as). Derrière la tête "P L(AE)CA/ ROMA",

Le revers figure un personnage militaire debout à gauche étendant la main droite au-dessus d’un citoyen debout à gauche, tourné à droite, vêtu de la toge. Derrière le personnage central, un magistrat debout à gauche, tenant une longue tige de la main droite (licteur). A l'exergue “Provoco” (Provocation),

Le revers a deux interprétations : il pourrait faire référence à la “lex Porcia de Provocatione” proposée par le consul Marcus Porcius Cato (un ancêtre du monétaire) en 195 avant J.-C. pour limiter le pouvoir de réquisition des gouverneurs mais il pourrait également faire aussi allusion aux lois “de tergo cives” proposées par Publius Porcius Luca, Lucius Porcius Licinus et Marcus Porcius Cato votées entre 198 et 194 avant J.-C. et qui visait à interdire les peines corporelles pour les citoyens.

Avec cette seconde hypothèse, le militaire placé au centre protègerait de sa main le citoyen situé à gauche qui s'apprêtait à recevoir un châtiment corporel de la part du soldat situé à droite et qui serait donc un exécuteur qui tient les verges.

A noter que ce denier est relativement rare puisque Crawford donne une estimation de 88 coins de droit & 110 coins de revers.

Ça fait du bien de revenir à la République de temps en temps car mes incursions en Numidie/Maurétanie et aux origines de la monnaie métallique frappée m'en éloignent régulièrement. C'est dur de devenir une 'multi)spécialiste

Beau denier avec un revers très intéressant...!!

Super ce revers, merci pour l'explication ! Et belle qualité en plus.

Un très beau denier, et un revers historiquement intéressant, mais qui se prête effectivement à plusieurs interprétations.
Le « provoco » de la légende, soit « j’en appelle (ad populum)», est la formule qui permet à tout citoyen romain de faire appel au peuple (la provocatio) d’une sentence prononcée par un magistrat. Ce recours ultime date de la lex Valeria de -300, qui soumettait toute décision de peine capitale, faite à Rome même, au jugement souverain du peuple, le soustrayant de fait à l’arbitraire des magistratures suprêmes, jusqu’au consul.

Les lois Porciae du IIe siècle, vers -195, qui durcissent la loi Valeria, et qu’on attribue au moins pour l’une d’entre elle à Caton l’ancien, ne sont connues qu’indirectement et les sources divergent sur leur contenu exact.

La loi « Porcia de provocatione », comme son nom l’indique, serait celle qui permet au citoyen de faire appel au peuple d’une sentence de sévices corporels, où qu’il se trouve sur le territoire de la république. (A part les commentaires de CGB, repris ici et là, je ne sais pas quelles sont les sources qui en feraient une loi limitant le pouvoir de réquisition des gouverneurs?)
Mais qui concernait-t-elle?
Le « pro tergo civium » (« contre les sévices envers les citoyens », le terme pro tergo indique seulement qu’on parle du supplice de la flagellation) est tiré d’une citation de Tite Live évoquant justement la loi Porcia: « Seule cependant, la loi Porcia semble avoir été portée pour défendre les citoyens contre les sévices, parce qu'elle punit d'une lourde peine quiconque aura frappé ou tué un citoyen romain »
(Tite Live, X, 9)
Il s’agit bien là d’une interdiction pure et simple et non d’une possibilité d’appel aux Comices centuriates lorsque cette sentence est prononcée.

Il restait cependant une exception à cette interdiction générale, et que viserait la loi Porcia « de provocatione », celle concernant l’armée, et il faudrait lire différemment le revers de ce denier. Le « provoco » serait prononcé non pas par l’homme vêtu d’une toge à gauche, mais par le militaire sans armes au centre condamné à la flagellation à mort (coercitio capitalis) par un magistrat détenteur de l’imperium, et prête à être exécutée par le licteur à droite. L’homme en toge représenterait à lui seul le peuple romain.
https://www.persee.fr/doc/efr_0000-0000_1990_ant_133_1_3976
(p. 584)

Il est de toute manière difficile d’interpréter l’attitude du militaire au centre comme un geste de protection. La provocatio s’adresse à une représentation populaire, contre l’imperium militiae, et il est donc plus probable, en deuxième hypothèse, que le personnage central soit alors celui qui a prononcé la sentence.

Merci Uzes c'est très documenté et intéressant

Tu as raison l'attitude du militaire reste plus que conjecturale. Dans le Babelon la scène du revers est décrite comme présentant un citoyen en toge à gauche, au centre un guerrier romain armé d'une cuirasse et d'une épée et à droite un liciteur portant les faisceaux

Oui on voit parfois cette description, et s’il y a bien une cuirasse, je cherche encore l’épée.

Celui qui l'avait décrit avec une épée, n'en était pas toujours une....!!!

Uzes a écrit:

Oui on voit parfois cette description, et s’il y a bien une cuirasse, je cherche encore l’épée.

Oui ce n'est pas évident non plus
Sinon je propose une nouvelle interprétation : il s'agit d'un bodybuildeur torse-nu dont on voit les abdominaux et pectoraux saillants

Et pourquoi pas?  Ça m’a aussi traversé l’esprit, je trouvais les détails de la cuirasse anatomique singulièrement appuyés sur certains exemplaires. Le soldat en attente du châtiment aurait déjà le torse à moitié dénudé. Mais je ne parierais pas ma chemise sur cette surinterprétation très orientée.