Voici qui essaie de réunir quelques connaissances numismatiques pour lancer une discussion.
Je n'ai pas trouvé de sujet sur le forum abordant l'archéologie de l'atelier monétaire romain de l'époque impériale. Je vous résume donc la théorie de Filippo Coarelli (dans le Guide Archéologique de Rome) , que je tiens pour très sérieux. Une excellente lecture!
Sous l'actuelle basilique San Clemente, entre le Colisée et le Latran, a été fouillé un complexe archéologique. La partie ouest ne fait pas de doute et est bien connue : c'est un mithraeum, d'époque sévérienne.
A l'est se trouve un bâtiment où une quinzaine de cellules régulières entourent un cour intérieure. Il y a un escalier, donc il devait y avoir un étage, mais sans doute dans un autre appareil, a priori de la brique et n'a pas laissé de trace.
Pour la partie est, Coarelli propose d'y voir l'atelier monétaire. Voici ses arguments :
- la bâtiment a des murs extérieurs de tuf équarri assez rustiques mais coûteux, alors que l'intérieur fait la part belle à la brique plus économique. Sa conclusion : les murs devaient, par nécessité, être très robustes.
- le premier niveau n'a montré aucune ouverture sur l'extérieur. Son interprétation : l'accès devait être contrôlé et pouvoir être restreint.
- des inscriptions trouvées à cet endroit mentionnent des officinatores d'atelier monétaire de 115.
(je reviendrai plus loin sur ces inscriptions que je suis allé rechercher sur le CIL, alors que Coarelli ne les détaille pas, ni ne donne leurs références).
- les régionnaires de l'époque constantinienne localisent dans cette région (III) l'atelier monétaire.
Il en déduit qu'il s'agit de l'atelier de frappe monétaire, déplacé de l'Arx, près du temple de Junon Moneta (cf denier Carisia), vers l'époque de Domitien (il date cela aux appareils et aux estampilles des briques, et Coarelli est une pointure là-dessus, et il relève encore une fois l'étrangeté quasi anachronique des murs extérieurs) après l'incendie de l'Aerarium en 80.
Son hypothèse ne semble pas faire l'unanimité, mais si on le suit, on peut soulever des questions d'ordre numismatique.
Au IIè siècle (?), le sol est surélevé de 80cm dans les cellules mais pas la cour. Pourquoi ?
Après le milieu du IIIè siècle, le niveau inférieur est comblé et abandonné et le bâtiment restructuré. Continuité de fonction malgré tout ? La faute à qui ? À quoi ? A une réforme ? Aurélien ?
J'ai cherché les inscriptions dont parle Coarelli. Il s'agit de CIL VI 42, 43 et 44. Les voici.
Je suis frappé par celle qui détaille les agents et les fonctions : un « optio et exactor », un « optio », ces 16 « officinatores » (quel rapport avec "nos" officines?).
Que seraient les suppostores?
Peut-on trouver une raison à ces ex-voto à Apollon, Hercule et Fortuna?
Voici ma (modeste) contribution à la réflexion collective. J'espère ne pas enfoncer des portes ouvertes ou aborder des sujets déjà traités.