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La légende de JanusLes monnaies républicaines, impériales et provinciales romaines des liens ci-dessous, de Panormos (Sicile), Rome (Italie) et Lyon (Gaule), portent sur leurs avers soit la tête de
Janus Bifrons, soit un bouc debout à droite et
Janus Bifrons au dessous, soit les têtes ou bustes à droite ou à gauche de Néron, Hadrien, Antonin le Pieux, Commode, Pertinax et Geta, et, sur les revers, soit l’incuse du
Janus Bifrons de l’avers, soit une aile d’oiseau, soit un petit oiseau debout à droite dans une couronne de feuilles, soit un aigle aux ailes ouvertes debout à droite, soit la louve allaitant Romulus et Rémus (voir mon post n.º 373,
La légende de Romulus et Rémus), soit la Victoire debout à droite couronnant un trophée ou l’attachant un casque, soit Rome debout à gauche tenant un sceptre et couronnant un trophée, soit la pointe d’une lance et la mâchoire d’un ours, soit la proue d’une gallère à droite, soit une légende dans une couronne de feuilles, soit la statue de
Janus debout de face tenant une lance ou sceptre et la foudre, en plein air ou dans un petit temple, soit le Temple de
Janus en différentes formes avec la porte fermée,
http://www.acsearch.info/record.html?id=138908http://www.acsearch.info/record.html?id=78699http://www.acsearch.info/record.html?id=85353http://www.acsearch.info/search.html?search=Janus&view_mode=1&en=1&de=1&fr=1&it=1#3http://www.acsearch.info/search.html?search=Janus&view_mode=1&en=1&de=1&fr=1&it=1&page=2#0http://www.acsearch.info/record.html?id=23051http://www.acsearch.info/record.html?id=56311http://www.acsearch.info/record.html?id=91682http://www.coinarchives.com/a/results.php?search=Janus&s=0&results=100La tête de
Janus Bifrons sur les monnaies sont toujours barbues. Les têtes masculines janiformes aux jeunes faces imberbes, souvent identifiées comme
Janus, ont été mieux identifiées comme les Pénates (voir mon post n.º 344,
La légende des Pénates), les Dioscures (voir mon post n.º 43,
La légende des Dioscures (Castor et Pollux)) ou Fontus (voir mon post suivant).
Dans la mythologie romaine,
Janus était le dieu des portes (de
janua, « porte » en latin), car il gardait les portes du ciel et du domaine des Dieux. Il était représenté avec deux visages, l'un tourné vers le passé et l'autre tourné vers le futur, parce que chaque porte ouvre sur deux possibilités, et tenant de la main gauche une clef, et de la droite une verge, pour marquer qu'il était le gardien des portes et qu'il présidait aux chemins. Ses statues marquent souvent de la main droite le nombre de trois cents, et de la gauche celui de soixante-cinq, pour exprimer la mesure de l'année. Il était invoqué le premier lorsqu'on faisait un sacrifice à quelque autre dieu.
Il aurait sauvé Rome en faisant surgir une source chaude devant les pieds des guerriers sabins que Tarpeia avait fait entrer dans la citadelle (voir mon post n.º 222,
La légende de Tarpeia). Le roi Numa Pompilius
lui fit bâtir un temple qui restait ouvert en temps de guerre afin qu'il puisse porter secours aux Romains, et qu'on fermait en temps de paix. Ce temple fut fermé une fois sous le règne de Numa ; la seconde fois après la deuxième guerre punique, et trois fois, à divers intervalles, sous le règne d'Auguste
. Le premier jour du mois et le premier jour de l'année lui étaient consacrés (d'où Janvier que Numa fit passer de la 11ème place à la première).
Les mythologues ne sont pas d'accord sur son origine
. Les uns le font Scythe ; les autres, originaire du pays des Perrhèbes, peuple de Thessalie ; enfin, d'autres en font un fils d'Apollon (Phébée) et de Créuse
, fille d'Érechtée, roi d'Athènes
, ce qui ferait de lui un parfait équivalent latin du héros grec Ion, fils traditionnel d'Apollon et de cette princesse athénienne. Devenu grand,
Janus, ayant équipé une flotte, aborda en Italie, y fit des conquêtes et bâtit une ville qu'il appela de son nom Janicule. Toutes ces origines sont obscures et confondues. Mais la légende le fait régner, dès les premiers âges, dans le Latium. Saturne, chassé du ciel, se réfugia dans ce pays, et fut accueilli par
Janus qui même l'associa à sa royauté (voir mon post n.º 335,
La légende de Cronos/Saturne). Par reconnaissance, le dieu détrôné le doua d'une rare prudence qui rendait le passé et l'avenir toujours présents à ses yeux
, ce qu'on a exprimé en le représentant avec deux visages tournés en sens contraires.
Ovide, dans le premier chant des
Fastes consacré au mois de janvier, identifie
Janus au Chaos des Grecs, racontant que lorsque les éléments formant la matière première de l'univers (l'air, l'eau, la terre et le feu) eurent été séparés, le corps d'un dieu se dégagea de cette matière, et que ce dieu fut
Janus, dont le double visage est la seule trace de l'état de confusion cosmique qui précéda sa venue au monde.
Selon une autre tradition issue de l'âge de bronze, pour les peuples italiques d'origine et non indo-européens,
Janus serait le « Dieu des Dieux », le tout premier être divin issu du Chaos. L'arrivée des Indo-Européens, ainsi que de leurs croyances, en Italie aurait ainsi modifié le panthéon local.
Janus était le père de Fontus (Fons, Fontanus), le dieu des sources et des eaux courantes, eut de Juturne
; de Proca, né de l'union avec la nymphe Cama
; de Tibérinus qui s'est noyé dans le Tibre, fleuve qui porte son nom, né de l'union avec Camisé
(voir mon post n.º 218,
La légende de Tibérinus) ; de Canens, la personnification du chant, qu'il maria à Picus, fils de Saturne né dans le Latium après son exil sur terre, et que la magicienne Circé (voir mon post n.º 109,
La légende d'Ulysse et Circé), par dépit amoureux
, devait plus tard changer en pic-vert. Par elle, il fut le grand-père maternel de Faunus, l'arrière-grand-père de Latinus
(voir mon post n.º 358,
La légende de Latinus) et l'ancêtre d'une longue lignée royale.
On lui prête également des amours heureuses avec la déesse des eaux douces Venilia
et, selon Ovide, avec la nymphe Cardea ou Carna
qu'il parvint à vaincre lors d'un défi — grâce à son double visage — et qui lui accorda ses faveurs à l'issue de sa défaite. Aussi en retour en fit-il une déesse, présidant aux gonds des portes et chargée, en parallèle, de protéger la santé des nouveau-nés, et notamment le bon développement de leurs organes.
Enfin, certains lui attribuent pour guides l'antique déesse Jana ou Diana, et voient dans ce couple de divinités exclusivement latines un parfait équivalent de celui formé en Grèce par Apollon et Artémis, à laquelle Diana fut rapidement identifiée.
Ovide dit que
Janus avait un double visage parce qu'il exerçait son pouvoir sur le ciel, sur la mer comme sur la terre ; il était aussi ancien que le monde ; tout s'ouvrait ou se fermait à sa volonté. Lui seul gouvernait la vaste étendue de l'univers. Il présidait aux portes du ciel, et les gardait de concert avec les Heures. Il observait en même temps l'orient et l'occident.
Il y avait plusieurs temples de
Janus à Rome : les uns de
Janus Bifrons, les autres de
Janus Quadrifrons. Au-delà de la porte du Janicule, en dehors des murs de Rome, on avait élevé douze autels à
Janus, un pour chaque mois de l'année
.
André Alciat dédia a
Janus l’emblème 18,
Prudentes, de son
Livret des Emblèmes, dont voici quelques traductions en vieux français :
http://www.emblems.arts.gla.ac.uk/french/picturae.php?id=FALb018Les sages.PROBLEME.
Jan a deux chefz, temps passé, & suyvant
Voyant derriere, ainsi comme devant.
Pourquoy has tu quatre yeulx, double visage ?
Est ce pourtant que tu fuz homme sage ?
LES PRUDENS ET bien-advisez.Janus à double chef, qui tout le temps suyvant
Cognois comme celuy qui est passé devant :
Qui n’es jamais deceu de quelque piperie,
Soit devant ou derriere, exempt de moquerie,
Pourquoy t’ont les anciens ainsi representé ?
N’est-ce point qu’en tes faicts fort prudent as esté ?
Les prudents.Janus au double front, qui ce qui est arriere
Connois, & l’advenir, vois devant & derriere,
Pourquoy as-tu tant d’yeux, pourquoy plus d’un visage ?
Pour figurer au vray l’homme prudent & sage.
Guillaume de La Perrière lui dédia l’emblème 1 de son
Le theatre des bons engins :
http://www.emblems.arts.gla.ac.uk/french/picturae.php?id=FLPa001Le dieu
Janus jadis à deux visaiges,
Noz anciens ont pourtraict, et tracé :
Pour demonstrer que l’advis des gents saiges,
Vise au futur, aussi bien qu’au passé.
Tout temps doibt estre en effect compassé,
Et du passé avoir la recordance,
Pour au futur preveoir en providence,
Suyvant vertu en toute qualité.
Qui le fera verra par evidence,
Qu’il pourra vivre en grand’ tranquilité.